BOLERO- PAPRIKA
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1950, une rafle policière anticommuniste
Durant
la Guerre Froide, les USA et le camp occidental révisent leur façon
de considérer l'Espagne franquiste, qui adhère au Plan Marshall,
mis en place en avril 1948 ... 1950, ce sont les débuts de la Guerre de Corée.
En
novembre 1950, l'ONU revient sur les sanctions de 1946 contre Franco.
En 1952, l'Espagne entre d'abord à l'UNESCO, puis en 1955, à l'ONU. Dans les pays alliés des américains, c'est maintenant la
traque aux communistes. Les autorités françaises ont anticipé et
les communistes étrangers sur son sol sont sous surveillance malgré le fait que la plupart, dans la Résistance, ont activement participé à la Libération.
C'est
ainsi que dès janvier 1949, le général guérillero Luis Fernandez
est arrêté en Ariège. Les organisations proches du PCE, le PSUC,
le PC d'Euzkadi, leurs journaux, « Mundo Obrero », « Nuestra
bandera » , sont dans le collimateur, ainsi que l'équipe médicale
de l'Hôpital Varsovie des Guerrilleros à Toulouse, l'entreprise
forestière du Sud-Ouest Fernandez-Valledor employant jusqu'à 700
personnes (et qui travaille pourtant pour la SNCF, lui livre des
traverses. Entreprise dont le siège est à St Simon, près de
Toulouse) ou l'Amicale des Anciens FFI et Résistants espagnols.
L'objectif
est de dissoudre les organisations et d'interdire leur presse,
d'appréhender les cadres du PCE, d'en assigner certains à résidence
( en Corse ou Algérie) ou de les expulser avec d'autres étrangers
suspects vers un pays de l'Est ( RDA... Jose Antonio Valledor, par
exemple, sera expulsé en Tchécoslovaquie)... Il suffit d'un
prétexte : ce sera la découverte à Barbazan ( Haute-Garonne) d'une
première cache d'armes dont on dit qu'elle appartient aux
guérilleros. Il y eut aussi la cache de Esperaza (dans l'Aude, sur
le lieu de regroupement de la XVème Brigade des Guérilleros).
La
couverture juridique est déjà prête : en application de la loi du
25 mars 1935 , sur l'arrestation et détention de personnes suspectes
et du décret ministériel du 2 novembre 1945 sur l'expulsion des
étrangers suspectés d'activités subversives . La liste des
personnes à arrêter est dressée, elle compte 397 noms de personnes
de 12 nationalités différentes. Cette opération de Police sera
baptisée Opération BOLERO-PAPRIKA ( Boléro pour son pan espagnol
et Paprika , pour le côté « oriental » ou soviétique) et se fait
en concertation avec... la police franquiste et le Consul d' Espagne
à Toulouse ( Moralejos),
Le
6 septembre 1950 donc, au petit matin et dans toute la France est
menée une grande rafle policière ( 11 arrestations à Paris, 107 en
Ariège, 50 à Toulouse dont les 6 médecins espagnols de l'Hôpital
Varsovie des Guérilleros......). Des fuites ont tout de même permis
que tous ne soient pas appréhendés (Enrique Lister, par exemple, a
pu y échapper) . Finalement 176 republicanos sont « inculpés »
sans audition, sans procès, et parmi eux , 33 sont expulsés en RDA
, 69 sont assignés à résidence en Corse, 78 en Algérie.
Fin
1950, le gouvernement français interdit le PCE, le PSUC, l'Amicale
des Guérilleros (…) et leurs membres sont contraints à la
clandestinité.... Les expulsions continueront quelques années. Et le préfet de Haute-Garonne, Emile Pelletier, qui avait organisé "la chose" avec le consul fasciste espagnol, les représentants des USA, est récompensé: il deviendra ministre de l'Intérieur du gouvernement De Gaulle.
En
novembre 1951, autre exemple, une nouvelle opération de police sera
menée par la DST sous le nom de code « Nevada » et encore en
collaboration avec la police franquiste, à l'encontre de réfugiés
bulgares, tchèques, de suspects ayant séjourné à « l'Est », et
de 9 espagnols ...
Ironie,
cynisme : L'Humanité titrera en page 4 : « C'est Franco le grand
vainqueur de cette journée. Il doit se frotter ses mains sanglantes
» . Pour se justifier, le Président du Conseil écrit à la
Ligue des Droits de l'Homme qui proteste contre l'arrestation de
héros espagnols de la Résistance française que cela « ne leur
confère pas le droit d'abuser d'une générosité qui n'a pas
attendu pour se manifester qu'ils aient combattu au côté des
français dans notre Armée ou dans la Résistance ...» : cynisme (
et oubli des camps) ! Il termine sa lettre par « … Il
n'implique pas pour eux de constituer sur le sol français de
véritables organisations de combat aux ordres d'une puissance
étrangère » (Archives Nationales, F 7 16 114) …. Et
les USA, à l'oigine de cette rafle, ne sont évidemment pas, elles, une puissance étrangère !
Quelques jours après, la presse de l' Espagne franquiste, La Vanguardia, le Diario de Barcelona se félicitaient du succès de Boléro-Paprika et de l'arrestation des responsables communistes.
Précision : La France, dans le cadre d'une alliance nommée "Troisième force" - soit: tous les autres contre le PCF, 1er parti du pays dans l'après-guerre- est alors gouvernée par René Pleven de l' Union démocratique socialiste de la Résistance, UDSR (de juillet 1950 jusqu'en février 1951). Le gouvernement compte quelques personnalités qui ne nous sont pas inconnues: Guy Mollet et Gaston Defferre , du Parti Socialiste SFIO et le jeune François Mitterrand, alors ministre de la France d'Outre-mer.
Petite synthèse de Philippe Guillen, "alias" Philippe Pif - 2015
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