1939. TEMOIGNAGES sur Argeles , Barcares , St Cyprien, Rivesaltes , Bram, Le Vernet, Septfonds, Gurs ...
1939-1940. Témoignages de 1ère main sur la vie dans ces camps de concentration -français ( des Témoignages et des sources ):
"GURS - Les Allemands faisaient crever, les Français laissaient crever. Toute la nuance est là "
1ère phrase du livre de Lilo Petersen , LES OUBLIES , 2007, Ed. Jacob-Duvernet et Librio Document. 2010 .
Lilo Petersen ( 87 ans ) raconte : Après
avoir fui de Berlin pour Paris, Lilo et sa mère sont convoquées au Vel' d'Hiv'
en mai 1940, ("épisode oublié", 2 ans avant la célèbre rafle de 1942). Avec 5000 femmes
allemandes elles sont victimes d'une 1re arrestation qui les emportera au camp
de Gurs, au pied des Pyrénées
Et là d'aucuns me diront: "Mais, ce sont les camps de Vichy !"
Alors, j'ajoute ces quelques extraits. Et là, d'aucuns ne peuvent plus baratiner: ce sont bien les camps de concentration français crées début 1939 par le gouvernement Daladier . La concentration sous la IIIème République.
Mais pourquoi feindre de s'en étonner ? C'est ce même Daladier et d'autres qui dès 1936 choisissaient la Non-intervention et laissaient toute liberté sans jamais les sanctionner à l'Allemagne nazie, l'Italie mussolinienne et le Portugal de voler à l'aide de Franco et ses sbires.
Maria
Bell·lloch raconte =
«
Allez ! Allez ! C’est le premier mot de la langue que nous ayons
appris. Par la suite, nous l’entendions continuellement. Lorsqu’ils
voulaient que nous avancions, ils criaient : Allez ! Allez ! »
Records
de la meva infància [Souvenir de mon enfance], Marseille, édition
dactylographiée de
l’auteure,
2000 (édition commerciale, Barcelone, Viena, 2000)
Ainsi parle Otília
Castellví =
«
Personne ne pouvait s’habituer à vivre là-bas, jetées sur le
sable, sans le moindre brin de paille pour les enfants ou les
vieillards. C’est pourquoi les camps des femmes étaient beaucoup
plus tragiques que ceux des hommes car ces derniers n’avaient ni
enfants ni vieillards. [...]
Pour
nous, les plaintes des vieillards et les pleurs des enfants ajoutés
à toutes les autres calamités
provoquaient une sorte d’hallucination irréelle. »
« De
les txeques de Barcelona a l’Alemanya nazi » ;[Des
prisons de Barcelone à l’Allemagne nazie], Barcelone, Quaderns
Crema, 2003
ou
Federica Montseny =
«
Pendant ce temps ma mère mourrait. Pendant ce temps, les proscrits
mourraient par milliers, pendant ce temps, je n’avais plus de père,
ni de mari, ni de foyer, ni de lendemain. Et, comme moi, des milliers
de femmes et d’enfants, des milliers d’hommes, des milliers de
familles. »
« Pasión
y muerte de los españoles en Francia » [Passion et mort des
Espagnols en France], Toulouse, Espoir, 1969
Lluís
Ferran de Pol témoigne =
«
Aujourd’hui, nous nous sommes approchés de la mer. Nous avons dû
contourner les immondices qui remplissent la plage. Mais ici, on
oublie tout. Nus face aux vagues, nous ne voulons pas penser que
derrière nous il y a une immense plage impraticable sur laquelle des
hommes doivent tracer des chemins à la pelle pour que les gens ne
s’embourbent pas dans les excréments d’autant de milliers
d’hommes. »
[...]
«
Si nous avions le conformisme des animaux, nous serions comme eux.
Nous sommes bien pis : nous sommes des bêtes tristes. [...]
Il
en est ainsi tous les jours et toutes les nuits. Uniquement des
sensations primaires : la faim, la jalousie, le froid, la soif...
C’est effrayant de se sentir à la fois si près et si loin de la
bête. »
Lluís
Ferran de Pol,
« Campo
de concentración (1939) « [Camp de concentration (1939)],
Barcelone, PAM, 2003. Un recueil de textes brefs publiés dans la
presse mexicaine, et la transformation catalane « De quan de Sant
Cebrià del Rosselló en dèiem Saint-Cyprien » (Lorsque l’on
appelait Saint-Cyprien Sant Cebrià del Rosselló)
Agustí
Bartra =
«
Ville de défaite. Les arbres sont de plus en plus loin. On dirait
que la plaine se retire. Les nuages errants passent vite. La mer
cache son écume. Pas un rire d’enfant, pas un glapissement de
fille. Faim et misère. Le pain, ce sont les rats qui le goûtent
avant nous. Aujourd’hui, des lentilles. On est sale. Demain des
lentilles. Poussière de sable et de sueur. Après-demain des
lentilles. Poux, gale, dysenterie. Toujours des lentilles. La France
est douce quelque part. »
Agustí
Bartr a «
Crist de 200.000 braços » [Le Christ aux 200 000 bras],
Barcelone, Aymà, 1974 (réélaboration de la nouvelle Xabola
[Bidonville], publiée au Mexique en 1943 )
Avel·lí
Artís-Gener (Tísner) =
«
Les journées s’écoulaient plus ou moins bien, mais les nuits à
la
belle
étoile étaient sinistres. L’unique solution consistait à
construire une pyramide humaine et à se relayer, chaque fois plus
vers l’extérieur. L’espoir de reprendre place au fond de la pile
de graisse permettait de supporter
le
tremblement et les claquements de dents qui nous assaillaient lorsque
nous étions dans la partie extérieure. »
« Viure
i veure » [Vivre et voir], vol. 3, Barcelone, Pòrtic, 1991.
Du
témoin Carles Fontserè =
«
Les très mauvaises conditions des haras étaient aggravées par
l’hostilité des gardiens. Du commissaire du camp, qui m’avait
semblé sympathique, jusqu’au dernier des gendarmes. ‘Si le
traitement ne vous plaît pas, vous n’avez qu’à rentrer en
Espagne.’ C’est ainsi que, chaque jour, des groupes fatigués ou
apeurés s’inscrivaient pour retourner dans l’Espagne de Franco,
immédiatement, ils étaient mieux traités. Aux yeux des gendarmes,
ceux qui restaient n’étaient que des voleurs ou des assassins.
Mais la dernière chose à laquelle je pensais était de rentrer.
Pour moi, la Catalogne n’existait plus. »
« Un
exiliat de tercera. A París durant la Segona Guerra Mundial »
[Un exilé de troisième classe. À Paris pendant la Seconde Guerre
mondiale], Barcelone, Proa, 1999.
Ramon
Moral i Quero =
«
Des hommes et encore des hommes. Du sable et encore du sable. Des
barbelés et encore des barbelés. Des baraques, de grandes
baraques... et des soldats noirs. Que font les soldats noirs ?
Ils
nous gardent ! Les hommes, ici, ressemblent à des singes en cage. »
« Diari
d’un exiliat. Fets viscuts » (1936-1945) [Journal d’un
exilé. Faits vécus (1936 – 1945)], Barcelone, PAM, 1979
De
Carles Pi i Sunyer =
«
Au milieu de cet enfer d’inquiétudes, de privations, de
douleurs,d’enfants perdus et de familles dissoutes, de
l’incertitude de ne pas savoir de quoi serait fait le lendemain et
de quel toit nous abriterait, dans cette confluence de délaissement,
d’opiniâtreté et de tristesse, la note la plus significative,
mais aussi la plus douloureuse, avec les traits incisifs et les
teintes ombreuses d’une eau-forte, était les camps de
concentration. Ces monstrueux parcs humains dans lesquels
s’amoncelaient comme de dociles troupeaux tant de milliers
d’hommes, de jeunes et de vieillards, de soldats, de paysans,
difficilement des ouvriers ou des commerçants, rarement des
ouvriers
dépendants et des hommes de professions civiles. C’est dans les
camps de concentration que se réunissaient les points locaux de la
Catalogne souffrante. Mais si ceux qui y étaient furent ceux qui
souffrirent le plus, ce sont aussi ceux qui espérèrent le plus. En
ces temps de défaite où même les idéaux chancelaient et les
convictions se trahissaient, l’endroit où l’on pouvait trouver
le plus de foi, de courage et de discipline, c’était dans les
camps de concentration.
»
Carles
Pi i Sunyer
« 1939. Memòries del primer exili » [1939. Mémoires
du premier exil], Barcelone, Fundació Carles Pi i Sunyer
d’Estudis Autonòmics i Locals, 2000.
Ces
quelques extraits proviennent de cette brochure illustrée ( 20 pages
Témoignages
catalans des camps français,
Publication
Institut Ramon Llull www.llull.ca
Conception
graphique : Jordi Calvet www.jordicalvet.net
Imprimé
par : Gràfiques Massana
Ou encore ces autres
témoignages rassemblés par mes soins =
Témoignage
de Remei Oliva (
une civile à Argelés ) =
« Remei Oliva (8), une
réfugiée Espagnole décrit son arrivée en France, à
Argelès-sur-Mer :
«...
Ils étaient innombrables ceux qui avaient déjà commencé à faire
des cabanes sur le sable avec quelques couvertures, et vous pouvez me
croire, ce n'était pas une saison pour ça. Il se passa quatre ou
cinq jours, et le pain arrivait de l'autre côté des barbelés, et
voilà que ce pain fut l'appât de notre souricière: chaque fois, il
restait de moins en moins d'ouvertures [ dans les barbelés ]. Au
bout de quelques jours il n'en resta qu'une et elle était gardée
par des militaires.
A
partir de ce jour là, nous devenions des prisonniers espagnols, dans
ce camp de concentration d'Argelès-sur-Mer....»
[
Remei Oliva raconte
aussi l'épisode l'épidémie de dysenterie qui s'est répandue dans
le camp d'Argelès-sur-Mer qui a abrité jusqu'à soixante-dix-sept
mille réfugiés ] :
«...
Ce camp était comme un immense camping, mais sans liberté et d'une
grande misère. [...] Il y avait des médecins espagnols mais ils
n'avaient pas de médicament, ils ne pouvaient vous donner que de
l'aspirine [...] Une partie du baraquement servait d'hôpital, il y
avait de la paille sur le sable, c'est tout. Il faut dire que la
dysenterie qui avait frappé tant de monde persistait, et beaucoup
étaient à bout de forces. Il les gardaient là sur la paille, et
quand vraiment ça n'allait plus, une ambulance les transportait à
l'hôpital de Perpignan. Souvent ceux-là ne revenaient plus! Je ne
sais pas pourquoi il en fallut un de spécial, mais à Saint-Cyprien,
ils firent un cimetière espagnol... » (10)
pages
18 / 19 et page 20 du Mémoire de Eva Lasbats
8
OLIVA Remei, Exode, de l'Espagne franquiste aux
camps français (1939-1940), Ed. L'Harmattan, 2010. (p 35 / sur 157
pages)
10
OLIVA Remei, Idem. (p 40 )
Ces
2 sont extraits cités dans le Mémoire
de Eva Lasbats.
L’APPORT
CULTUREL DES EXILES REPUBLICAINS ESPAGNOLS A LA VILLE DE TOULOUSE
(1939-1975-Enjeux de la gestion patrimoniale de la mémoire de l’exil
républicain espagnol à Toulouse 2013 -
Témoignage de
Francesc Teix (qui sait de quoi il parle... Il fut ensuite déporté
à Mauthausen ) =
« En France, les français nous ont traité
presque aussi mal que les nazis. Il y avait une seule différence :
les français nous faisaient mourir de faim et les nazis nous tuaient
directement. Si un chien ou un oiseau vous dérange, il suffit de ne
pas lui donner à manger pendant quelques jours et vous verrez si
vous ne le retrouverez pas mort. Qui peut accuser les français
d'avoir tué ceux qui mouraient de froid, de faim ou de désespoir
dans les camps de concentration ?
Personne... »
in Monserrat Roig, « Els
catalans als camps nazis » ,réédition traduite du catalan –
Edition Triangle bleu/Générique, 2005 – page 53 – châp .
II. Presoners a França,
Ernest Urzainqui-
Falcon témoigne =
« ... Nous sommes rapidement conduits au
camp de concentration, déjà presque définitif et construit
pour nous, de Barcarés-sur-Mer ; il est situé sur une immense
plage désertique et lugubre, nous avons la mer d'un côté et une
grande lagune de l'autre ; en bref, nous sommes entourés d'eau
de toutes parts. Nous espérions trouver des baraques acceptables,
mais notre désillusion est grande : ce sont des huttes immondes
qui ressemblent plus à des nids à rats qu'à des habitations pour
des êtres humains, elles sont en laine et en forme der triangle,
deux mètres de large à la base et un mètre cinquante de haut,
autant dire qu'il est impossible de se tenir debout, il faut toujours
marcher plié en deux, elles font huit dix mètres de long et ont une
seule ouverture à une extrémité. Nous sommes entassées comme des
sardines, cinquante hommes, c'est une véritable porcherie ; au
sol, il y a un peu de paille déjà à moitié pourrie à cause de
l'humidité du sable.
Les poux pullulent par milliers, en l'espace de quelques
minutes nous en tuons plus de cent, ils sont gorgés de notre sang,
mais tout cela est inutile car un moment après ils t'envahissent à
nouveau.
Si les autorités françaises nous accordaient quelques
moyens, nous pourrions peut-être en finir avec eux, en faisant
bouillir nos vêtements par exemple, mais nous n'avons absolument
rien, pas de bois ni de récipients pour cela, pas même du savon,
alors pour le moment nous gardons nos poux et nous devrons nous en
accommoder. Nous dormons à même le sable, nous avons fait brûler
la paille qui était complètement pourrie. Pour boire, nous laver et
cuisiner, de l'eau à volonté ; mais quelle eau, simplement un
tuyau planté dans le sable, à 100 mètres à peine de la mer, une
pompe à main, et en quelques minutes nous avons de l'eau, presque
salée, naturellement, et infestée de microbes ; la cause est
bien simple : nous sommes des milliers d'hommes entassées comme
des sardines, une espèce d'énorme troupeau qui doit faire ses
besoins sur la même plage d'où nous tirons l'eau que nous buvons,
ce qui suppose beaucoup de pollution et de nombreux risques de
maladies ; il y a des morts par intoxication mais qu'est-ce que
ça peut faire, tout le monde s'en moque.
La nourriture, très maigre et de mauvaise qualité,
n'est pas même bonne pour les cochons, c'est très difficile de se
maintenir en forme moralement et physiquement, avec les saletés
qu'ils nous donnent... Plusieurs camarades s'évanouissent de
faiblesse à cause de la malnutrition... Plusieurs autres,
malheureusement, meurent de dysenterie à cause de l'eau infâme que
nous buvons. Il y a une espèce d'infirmerie où il n'y a pour tous
les maux et les maladies, que l'aspirine ; c'est le remède
miracle des camps de concentration. D'après les médecins
espagnols qui sont avec nous dans le camp, au moins soixante
Espagnols sur cent souffrent de malnutrition ou de dysenterie à un
niveau plus ou moins élevé de gravité, il y a aussi un nombre
important de pneumonies ; parmi les autres maladies les plus
courantes se trouvent la tuberculose, la lèpre, la conjonctivite, et
la teigne dans une large mesure...
Dans l'enfer de Dante, il y avait neufs cercles à)
passer... Les camps de concentration français qui avaient été
réservés aux réfugiés espagnols faisaient partie du dernier
cercle, OUI ! Le dernier cercle de l'enfer et de l'horreur... »
Ernest Urzainqui- Falcon
« Polvorientos caminos - itinéraire européen d'un
républicain espagnol (1936-1945)»-
texte présenté
par François Godicheau - Editions Privat, 2010- pages 86, 87, 88.
Récit d'Indalecio
Gonzalez Roble =
« Nous de la frontière, ils nous ont amenés au
camp de concentration de St-Cyprien. Il n'y
avait rien que du sable, il n'y avait pas de baraques. Il y avait
Rrrrien !!!
Il y avait beaucoup de fils barbelés, de l'autre côté
pour qu'on s 'en aille pas. Pour qu'on ne sorte pas, Et de
l'autre côté, il y avait la mer ! Donc : on ne pouvait
pas sortir, Et du côté des fils barbelés, dehors, il y avait des
Sénégalais qui nous gardaient...
Quand même, ça aurait du être provisoire et puis...
des conditions décentes... Ce qu'il y a : ils ont commencé à
faire des baraques. Le camion qui portait le pain, il rentrait pas
dedans, il nous jetait le pain comme ça... dehors et on donnait du
pain pour quatre. Et on le partageait ; celui qui le prenait le
partageait avec trois autres personnes. Puis après, ils ont commencé
à faire des baraques. Cinq ou six baraques en bois. Evidemment là,
on a commencé à organiser un peu : les professeurs, les
intellectuels et tout ça. J'étais pas un intellectuel ! Ils
ont commencé à donner un peu de leçon, à créer des jeux.
Dans la baraque où j'étais la seule personne qui
savait jouer aux échecs, c'était moi ! J'avais appris à
l'hôpital de Camprodon et là j'apprenais à ceux qui voulaient.
Tout le monde me gagnait après ! Ca c'était ! ... et là,
j'étais content. Parce que j'ai dit : « je suis bon
professeur ! Je forme bien !...
Là, ils m'ont amené au camp de concentration du
Vernet d'Ariège. Pourquoi, je ne sais pas. Peut-être je ne saurai
jamais.
On m'a emmené là avec une quinzaine de camarades. Les
gendarmes ils nous respectaient parce que tous ceux qui étaient au
camp du Vernet avaient la réputation d'être de fortes têtes,
prêtes à faire n'importe quoi...
Là, on a passé un peu de temps. Il y avait rien que
des baraques en bois. Il y avait des gens qui dormaient couchés à
ras de terre.Dans la nôtre, il y avait 3 ou 4 trucs pour dormir les
uns sur les autres. On dormait à plusieurs sur la même couche. On
essayait de se regrouper entre amis. Il y avait d'abord ceux qui
dormaient par terre puis, au-dessus, deux ou trois étagères qui
servaient de couches...
Le gros problème, c'était les poux. On en était
farci. Tout le temps que j'ai passé, on m'a rasé les cheveux. Tous
les jours. Ya des gens qui me disent : « Toi à prêt de
85 ans, tu gardes encore tous tes cheveux » ; Je dis :
« Non ! Peut-être que ça m'a servi de me raser les
cheveux tous les jours,,, ça m'a fortifié les racines ».
Je me souviens d'une chose : devant le camp du
Vernet, sur la route devant, quand il a passé le Tour de France, en
tête, il y avait René Vietto, un coureur cycliste français, et
quand il est passé devant le camp de concentration, il
nous a salué comme ça avec le poing en l'air... en 1939... lui, il
était en tête, peut-être c'était exprès parce qu'il a dit aux
autres : « le camp des Espagnols, il est là »...
enfin, quand il est passé devant le camp, il a levé le poing !
Ca, c'est un truc que je me rappellerai toujours... »
pages 80 à 83 ,
« Mémoire de Républicains espagnols- Des croisements
d'histoires » Editions n&b, 2006 –
Témoignage de José
Bilbé =
« On était traité comme des bêtes, Il n'y
avait aucun respect... Ils se foutaient de nous, encore !... Ils
se marraient de nous parce qu'on avait perdu la bataille.Mais, on
disait :
- En perdant on gagnera autre chose ! Plus tard, la
victoire sera à nous parce qu'on a été les victimes !
C'est vrai que là-dedans, on n'était pas tout à fait
humain. On était plutôt comme des bêtes : il arrivait un
camion qui nous portait du pain. Pour s'amuser, le soldat, il jetait
un pain dans un groupe et on se jetait sur le pain comme des
fauves ... des fois, le camion passait sur un pied, un bras...
alors ça, j'appelle : traiter comme des bêtes parce qu'ils
savaient qu'on était affamé. Il nous jetait un pain comme ça
l'amusait ! C'était du sadisme !
Pareil : ce qui était dur, c'est si tu voulais
t'amuser. Des fois, on s'amusait ; prendre une couverture à
quatre, un dedans – c'est solide une couverture – et tu tirais,
d'un coup ! De faire ça tu étais puni ; tu allais à l' »
hippodrome ».
L'hippodrome ?... Vous savez pas ce qu'est
l'hippodrome ?... Il savaient fait un rond, fermé avec des
barbelés et tu y étais une heure à tourner dedans. Parce que si tu
t'arrêtais, t'avais le fouet ! Des fois, t'y restais plusieurs
jours, jour et nuit, avec juste du pain sec et de l'eau, Alors, t »as
rien d'autre à faire que de tourner.
Je crois que ça, c'était pas humain. Pour un pays
civilisé comme la France, c'était pas humain. Je sais pas moi, où
on trouve ça, où on peut faire des trucs comme ça ?
C'est sûr, en Espagne, ils ont fait des atrocités avec
les hommes et les femmes. Les femmes, les cheveux coupés à ras. Ca,
je le savais parce qu'il y en avait toujours quoi passaient la
frontière qui nous racontait ce qui se passait. Mais là, en
France ! ( p,. 78)
[ ... ]
Argelés, Saint-Cyprien, Barcarès et Agde, 9 mois en
tout. On changeait à peu près tous les deux mois. On nous changeait
parce qu'on organisait des sortes de grève, des soulèvements.
C'est-à-dire on manifestait, on était maltraité, on était mal
nourri. On a même fait la grève de la faim : on crevait de
faim et on a fait la grève de la faim ! Pour que le
gouvernement sache que ces hommes étaient dans des conditions
inhumaines. On a manifesté pendant une semaine sans manger. Mais il
y en avait la nuit qui avaient caché du pain et, la nuit, tu
entendais RAC RAC RAC !... Manger le pain sec...
- Mais ! ?... Il y a des rats là-dedans !
…
Y avait des choses dures : avoir faim et ils
passaient avec les chaudrons de la soupe. Et on se refusait à en
prendre parce que gare si tu prenais ! Il y avait des
représailles, entre nous ! On avait conclu qu'on ferait grève
tant qu'il n'y aurait pas de meilleur... donc, il fallait tenir
parole pour démontrer.
Eh ben, on a pu passer comme ça jusqu'à ce qu'ils oint
porté de la bonne soupe, de la meilleure soupe !
Ils nous donnaient des lentilles, des haricots vieux qui
sont plein de ?... Comme des vers !... Des charançons...
Oui, c'est ça !... des... Ces bêtes, elles sont dans les
lentilles, les haricots, Vieux bien sûr. A près, ça c'est
amélioré. »
Et page 88 de
« Mémoire de Républicains espagnols- Des croisements
d'histoires » Editions n&b, 2006 –
Rafael Gomez, futur
membre de La Nueve ( de la 2ème D,B. de Leclerc)
«... Moi, on m'a emmené au camp de St-Cyprien. Les 4
premières semaines ont été un véritable calvaire. On allait pieds
nus, on buvait de l'eau sale et savonneuse qui venait de l'endroit
même où on se lavait ; quand on buvait, nos bouches faisaient
des bulles... On nous donnait très peu de nourriture : un pain
pour dix personnes, et, de temps en temps, des patates avec un peu de
viande et des os bouillis.
On s'est rempli tout de suite de poux. C'était une
vraie souffrance. On allait tous les jours à la plage pour
s'épouiller. Et ils étaient toujours là !... La nuit on
creusait un trou dans le sable pour se coucher, et on se recouvrait
d'une couverture.
Au bout de quelques semaines, on a commencé à
construire nous-mêmes les baraquements ; pour ce travail, on
nous donnait un morceau de pain et une sardine. Dormir dans les
baraques n'a pas amélioré nos vies. Peu à peu, on s'est organisés,
mais avec très peu d'espoir. On était gardé par des Sénégalais
qui nous traitaient très mal ; et s'ils te voyaient tenter de
sortir du camp, ils te crucifiaient à coup de crosses !
Chaque semaine, les gendarmes venaient demander des
hommes pour la Légion. Beaucoup y allaient, d'autres non. Moi, je
n'ai pas voulu aller à la Légion. Je suis resté pour attendre mon
père.
Comme j'avais de la famille à Oran, j'ai écrit à un
oncle, depuis le camp, et j'ai reçu très vite l'adresse de mon père
qui se trouvait à Argelès-sur-Mer. Peu après, celui-ci réussissait
à sortir de là et venir dans le camp où je me trouvais.
On a pu, comme ça' rester ensemble quelque temps. Il a
réussi à sortir peu après, réclamé par son frère ; mais
moi, comme je n'y avais pas droit en tant que neveu, je n'ai pas pu
sortir. A la fin, on a fait de faux-papiers et j'ai pu sortir, en
tant que frère de mon père... Peu après, j'ai pris un bateau et
j'ai pu arriver à Oran... »
Dans « La Nueve, 24 août
1944... » Evelyn Mesquida – Cherche Midi, 2011 ( page196 ),
entretien hiver 2006
De Roc d'Almenara (
sur la dysenterie aigüe ) =
« L'eau saumâtre des pompes commençait à
produire des effets. De nombreux internés traversaient l'enceinte au
prix de déchirures dans leurs vêtements et ils s'éloignaient un
peu pour soulager leurs intestins malades. Ils furent bientôt si
nombreux dans cette situation qu'on ne pouvait plus marcher sans
souiller ses chaussures, et on commençait à sentir partout la
mauvaise odeur. »
Roc d'Almenara « Diari
d'un refugiat català », cité in Camp du mépris, des chemins
de l'exil à ceux de la résistance » - René Grando , Jacques
Queralt, Xavier Fabrés – Trabucaïre, 1991 – p 115
Témoignage de Juan
Carrasco, sur « la mierda » =
« Quand ça nous
prenait, il fallait courir jusqu'à la plage. On criait : « A
la playa ! A la playa ! » et tout le monde comprenait
de quoi il s'agissait. Parfois, la crise de diarrhée était si
violente que les gens se chiaient littéralement dessus, comme des
gosses.
La fosse d'aisance était
un grand trou carré au bord de l'eau. Autour nous étions serrés à
nous toucher, tous mélangés, hommes, femmes, enfants, des centaines
en même temps . Un avion de la « Fox Movitone » est
même venu nous filmer à plusieurs reprises dans cette
position ... »
« Camp
du mépris, des chemins de l'exil à ceux de la résistance » -
R, Grando , J, Queralt, X, Fabrés – Trabucaïre, 1991 – p .
115 / 116
Et Agusti Bartra,
présente une adaptation scatologique d'une célèbre chanson
républicaine =
Si me quiere escribir
ya sabes mi paradero
en el campo de Argelès
Primera linea de mierda...
In
son livre « Crist de 200 000 braços » , extrait repris
page 116 du livre « Camp du mépris, des chemins de l'exil à
ceux de la résistance » - R, Grando , J, Queralt, X, Fabrés –
Trabucaïre, 1991
Voila ce qu'écrit
Jean Olivo ( camp d'Argelès ) =
« Harcelé par les projections de sable, plié
sous les rafales, j'ai parcouru le camp sur toute sa longueur .
La mer, d'un côté, le marécage de l'autre, cet espace est
démesuré, hors des pensées humaines.
A la limite du plus grand flot derrière une dune j'ai
aperçu une couverture étendue, en partie ensablée, retenue au sol
par des pierres. Au passage, chaque bourrasque soulevait et faisait
battre un de ses pans. Intrigué, je me suis approché. La guenille
couvrait une fosse et, posée sur des branchages, formait un toit, Il
m'a été facile de soulever un coin de ce précaire abri.
Au fond, côte à côte, deux formes recroquevillées,
Un visage hirsute, exsangue, figé, paupières closes et violacées
donnait l'impression d'un masque de cire. A côté un autre visage
plus atroce encore, Des yeux immenses, exorbités, reflétant une
incommensurable terreur me fixaient, insupportables.
La vision de deux spectres ! Une hallucination
cauchemardesque : un cadavre tenant compagnie à un mort vivant,
paraissant le retenir, agrippé dans un spasme . »
(Jean
Olivo « Parcours (Paco, Espagne 1936-1939) »- Edition du
Castillet, 1972, page 206 + repris en pages 80, 81 du « Camp du
mépris, des chemins de l'exil à ceux de la résistance » - R,
Grando , J, Queralt, X, Fabrés – Trabucaïre, 1991 – p 80 / 81)
Joan Mestres, qui
passa par le camp d'Argeles avant de connaître Mauthausen=
« En France, le
premier mot que nous avons entendu fut : « Allez-hop ! »
et après, un coup de pied au cul. Ils nous ont emmenés au camp
d'Argelès et ne nous ont donné ni eau ni nourriture pendant dix
jours. Nous buvions l'eau de mer et beaucoup mouraient de dysenterie.
Un camion venait de temps en temps et nous lançait du pain comme si
nous étions des animaux. Nous échangions nos montres et nos
alliances contre de la nourriture, Beaucoup de réfugiés sont morts,
il y a eu une épidémie au cours du mois de mars et les fièvres
ont emporté beaucoup d'enfants. Au bout d'un certain temps,
l'intendance a été organisée et on a fait appel à moi pour y
travailler. Nous avons essayé de doubler les rations, mais nous
avons été découverts. L'armée est arrivée un jour, on nous a
fait lever de bonne heure et on nous a fait retourner au camp à
coups de pied au cul. Alors ils se sont occupés eux-mêmes de
l'intendance. Après, j'ai atterri à Agde, le « camp des
catalans ». C'était mieux , nous n'étions plus sur le sable
et nous pouvions dormir sur des planches avec des couvertures. Les
Français le présentaient comme un camp modèle et les gens des
environs y venaient même pour disputer des matchs de rugby et de
football. On nous a demandé de partir dans les Compagnies de
Travail, mais nous avons refusé. Nous nous sommes mis en grève,
notre chef était Trueba. Ils nous ont envoyé la police pour nous
punir et nous ont imposé une discipline de fer, Au bout d'un mois,
ils m'ont renvoyé à Argelès. J'ai tellement été déçu en
revoyant ce camp que j'ai voulu me suicider. »
( Monserrat Roig, « Els
catalans als camps nazis » , Ed 62, Barcelona, 1977 ––
châp . II. Presoners a França, )
José Ribelles
raconte =
« A Argelès-sur-Mer, on dormait à même le
sable. Avec deux bambous comme ça et une couverture... comme une
tente. Quand on en avait marre de dormir sur un côté on se tournait
tous en même temps de l'autre côté. Porque il n'y avait pas
de place.
Quand ils distribuaient à manger, je tenais encore pas
bien debout, alors je restais garder les affaires. Les personnes
fortes allaient chercher le pain. Comme ça jusqu'au mois de mai y
despues Bram, le camp de Bram : des baraquements bien
faits et tout ça. En bois y chaque dos metros, dos personas.
A chacun, une poignée de paille... un peu de paille sur la terre, ça
servait de couche. A Bram, le manger, ça allait bien. C'était mieux
qu'à Argelès. Tambien ; on pouvait faire de la
gymnastique.
A Argelès, je me souviens, les gendarmes, nosotros
on était jeune, quand on est jeune on ne pense qu'à s'amuser ;
on faisait un trou dans le sable. On leur faisait croire qu'on
enterrait quelque chose. Et, aussitôt, les gendarmes, ils arrivaient
avec une petite pelle pour voir s'il y avait de l'or... »
dans « Mémoire de
Républicains espagnols- Des croisements d'histoires »
Editions n&b, 2006 – page 80
Ce que dit le
Docteur Pujol du camp de concentration de St-Cyprien =
« Je me trouvais à l'hôpital du camp de
St-Cyprien.Un épidémie de paludisme s'y était déclarée. Nous
autres, les médecins républicains, avons présenté un rapport où
nous demandions aux autorités sanitaires du camp de déclarer
St-Cyprien zone paludéenne. Le ministère de la santé français
refusa de reconnaître que c'était une épidémie et que St Cyprien
était une zone paludéenne. Le docteur Serra et moi-même, nous nous
sommes mis à pourchasser le moustique anophèle qui provoquait
l'épidémie. Après de nombreuses recherches et après avoir
parcouru pendant très longtemps les flaques d'eau stagnante qui
entouraient le camp, nous avons trouvés plusieurs moustiques
anophèles et nous les avons portés aux autorités sanitaires du
camp. Elles ont fini par se rendre à l'évidence et par déclarer
St-Cyprien zone paludéenne. »
(
in Monserrat Roig, « Els catalans als camps nazis » , Ed
62, Barcelona, 1977 – page 38-51 – châp . II. Presoners a
França, + repris aussi en pages 80, 81 du « Camp du mépris,
des chemins de l'exil à ceux de la résistance » - R, Grando ,
J, Queralt, X, Fabrés – Trabucaïre, 1991 – p 80 / 81)
(A St Cyprien et
Argelès ) vu par Dolors Gener, future déportée en camp nazi =
« Ils
nous ont tous rassemblés, femmes et enfants qui étions dispersés
dans les refuges du sud de la France, et ils nous ont conduits à la
gare de Bordeaux.Là nous avons compris qu'ils voulaient nous
renvoyer en Espagne et nous nous sommes tous mis à crier : « En
Espagne, non ! En Espagne, non ! » dans le vacarme de
nos cris et des pleurs des petits ! Nous faisions tellement de
bruit que les Français nous regardaient, effrayés.
Ils nous ont demandé lesquelles d'entre nous avaient
leur mari à Argelès ou St Cyprien et ils nous ont mises dans un
coin, Ils ont fait remonter les autres dans le train et, de là, les
ont emmenées vers Gurs, puis vers l'Espagne. Nous n'avons plus rien
su de ces femmes. Je sais seulement que l'une de mes camarades qu'ils
avaient fait rentrer a passé au moins 17 ans en prison.
Cela se passait vers le mois de septembre 1939, quand la
France et l'Angleterre ont déclaré la guerre à l'Allemagne.
J'étais au camp de St Cyprien. Nous dormions sur le sable et, la
nuit, il commençait à faire très froid. Les enfants tombaient
comme des mouches, même ceux qui avaient 6 ou 7 ans et qui
paraissaient plus forts. Toutes les nuits, nous entendions leurs
pleurs. C'est dans ce camp que ma petite est morte, elle avait 3
mois. Et moi, je n'ai rien pu faire. Elle est morte dans mes bras,
elle était maigre comme un clou, je suppose que c'était de faim et
de froid.
Il y a eu une inondation dans le camp, l'eau nous
arrivait jusqu'au cou et les épidémies se propageaient à mesure
que l'eau montait. Il nous ont envoyé alors à Argelès qui était
divisé en 3 camps. Dans le premier, il y avait de nombreuses
familles ; le second n'était pas encore fini, il n'y avait que
les fils de fer barbelés et ils ont mis les hommes dans le
troisième. Nous étions dans le deuxième camp et nous essayions de
communiquer avec les hommes du troisième camp en criant très fort .
Lorsque ma fille est morte, mon mari s'est engagé dans l'armée
française, parce qu'il croyait pouvoir ainsi me faire sortir du camp
Il a avancé vers le Nord et a participé à la bataille de Narvik.
Mais il en a eu marre parce qu'il n'avait pas réussi à me faire
libérer, Il les a envoyés au diable et il est parti pour la Suède.
A Argelès, au début il y avait les sénégalais qui
traitaient nos maris à coups de pied et à coups de fouet. Mais ils
ont été vite remplacés par les gardes mobiles, parce qu'ils
devaient trouver que les sénégalais étaient trop mous. J'ai vu
comment ils tuaient l'un des nôtres sous les ruades des chevaux. »
( Monserrat Roig, « Els
catalans als camps nazis » , Ed 62, Barcelona, 1977 – page
38-51 – châp . II. Presoners a França, )
Argeles, témoignage
de Michel Oliva =
« Le camp d'Argelès ?... Des baraques en
bois, en tôle. On avait fait ça à coup de poings, n'importe
comment, avec de la paille, je sais pas comment ils avaient fait
ça ... Quand le vent soufflait, ça tapait de partout. Quand il
pleuvait, l'eau passait dessous, dessous les planches,.Alors les
nuits, c'était épouvantable quand il y avait l'orage et ça
arrivait souvent !...
Le matin, quand tu te levais, tu sortais, tu te
retournais :
Oh Un mer magnifique !...
On y voyait des bateaux rentrer...
Et puis, on tournait la tête :
On voyait cette misère-là !...
Je vais vous raconter une histoire. Ca va vous faire
drôle :
On nous avait séparé dans le camp. D'un côté, on
avait mis les hommes. De l'autre les femmes et les enfants. Entre :
des fils de fer barbelés mélangés, 1,50 m de large et des
Sénégalais prêts à tirer... Y avait aussi, j'avais oublié le
camp n° 9 qui était séparé des autres camps. Le camp n° 9,
c'était les malades, les vieux. Je ne veux pas être mauvaise
langue : y avait pas de quoi soigner ! Alors, des morts...
il y en a eu beaucoup de morts...
Bref, on nous avait séparé de notre père quoi. Mon
frère qui avait 4 ans, il est tombé malade. Très gravement malade.
Il allait mourir.
Mon père a demandé à venir le voir. Et moi, j'avais 9
ans, Je vivais à même le sable. J'ai vu mon père arriver...
encadré par les gendarmes.
Les gendarmes !
Pour qu'il vienne voir son fils !
Horrible !!! »
page
79 « Mémoire de Républicains espagnols- Des croisements
d'histoires » Editions n&b, 2006 –
Ce
fils de carabinier raconte raconte ses vingt mois au camp de
Rivesaltes pour le journal LA DEPECHE du Midi. De mars 41 à
novembre 1942 . Il avait onze ans. Il y est arrivé avec ses quatre
frères et sœur, sa mère et sa grand-mère.
« On vivait dans la vermine. Le pire c'était les punaises. On était obligé de se couvrir la tête pour dormir. Elles rentraient par les oreilles, par le nez. Il n'y avait pas d'eau ni d'électricité. Juste un tuyau percé sur une citerne montée sur roues. Avec ce petit filet d'eau, on devait se laver, faire la lessive et stocker l'eau nécessaire pour la journée. Mais on n'avait même pas de récipient pour ça [… ] On ne dormait pas dans des lits mais dans des cages en bois qui servaient à la fois de sommier et de matelas avec un peu de paille. Les plus chanceux avaient une couverture [. ...] Je ne suis pas animé par un esprit de revanche mais par une volonté de mémoire »,
« On vivait dans la vermine. Le pire c'était les punaises. On était obligé de se couvrir la tête pour dormir. Elles rentraient par les oreilles, par le nez. Il n'y avait pas d'eau ni d'électricité. Juste un tuyau percé sur une citerne montée sur roues. Avec ce petit filet d'eau, on devait se laver, faire la lessive et stocker l'eau nécessaire pour la journée. Mais on n'avait même pas de récipient pour ça [… ] On ne dormait pas dans des lits mais dans des cages en bois qui servaient à la fois de sommier et de matelas avec un peu de paille. Les plus chanceux avaient une couverture [. ...] Je ne suis pas animé par un esprit de revanche mais par une volonté de mémoire »,
dit-il au journaliste de la Dépêche du 16/10/2015
Témoignage
de l'aragonais Mariano Constante (un
militaire)
:
Dans
son livre autobiographique
« Les années Rouges »
(Mercure de France – 1971)
il raconte sa jeunesse sous la République, la Guerre au sein de la
fameuse 43éme Division (dans la Bolsa de Bielsa), son premier
passage en France, son retour au combat, en Catalogne, puis la
Retirada et les camps de concentration français, les CTE dans l'Est
et enfin son expérience de déporté à Mauthausen et ses
responsabilités au sein de la Résistance dans le camp nazi. Page
137 / 138 / 139 . .. Et il ironise parfois, « par
gentillesse » ...
«...
Un groupe important d'officiers du 10ème corps fut envoyé
vers Septfonds. Nous étions quatre à cinq cents officiers et
commissaires et sous-officiers ; parmi eux, une majorité du
10ème corps d'armée et de nombreux membres de ma Division, Je
retrouvai mes camarades et naturellement mon capitaine [ … ] Par
gentillesse les autorités françaises nous avaient mis des wagons de
3ème classe au lieu de wagons de chevaux.
Abattu
par notre défaite, le travail ; le froid ; les visions
dans le hall de la Tour de Carol, j'étais malade au départ. Cela ne
fit que s'aggraver, A Caussade, on fit arrêter le train en dehors
de l'agglomération, Nous descendîmes pour faire à pied le chemin
jusqu'au camp de Septfonds. Une nouvelle surprise nous attendait :
un régiment de Sénégalais entourait le train et devait nous
escorter, Armés d'un fusil et d'un coupe-gorge ou d'une machette,
ils nous poussaient sans ménagement, commandés par de jeunes
officiers français, Terrassé par la fièvre, je tenais à peine
debout, Mes affaires furent prises par mes camarades, Comme je
n'avançais pas assez vite, un Sénégalais vint me pousser avec la
crosse de son fusil, Ce fut comme un éclair, le capitaine Pastor
avait laissé tomber ses baluchons, et d'un coup de poing terrible
expédia le Sénégalais par terre, sans connaissance, Les autres
Sénégalais se mirent à hurler, et leur officier vint en courant,
blême de peur, Pastor, qui parlait français , lui dit :
- Faites nous traiter en êtres humains que nous sommes, Nous sommes habitués à nous battre et nous permettrons pas qu'on nous maltraite,
La
colonne se remit en marche sans autre incident, toujours escortée
par les Sénégalais.
Arrivés
à proximité de ce qui devait être , plus tard, le camp de
Septfonds – aucune baraque n'était encore construite – nous
fumes parqués dans un périmètre entouré de fils de fer barbelés.
Cet emplacement fut appelé camp de Judas, Pas une construction, pas
un arbre : un terrain nu, Nous n'avions que nos tentes ou nos
couvertures pour nous protéger du froid, Pour nos besoins, une
tranchée . Combien étions-nous ? 14 000 ? 20 000 ?
Je n'en sais rien, nous ne pouvions faire un pas. Mes amis montèrent
ma tente et je fus allongé par terre, enveloppé avec ma couverture,
Un médecin diagnostiqua une broncho-pneumonie, Malgré tous les
efforts de Segundo, de Pastor, aucun médecin français ne vint me
voir, Pas un seul médicament, Pour comble de malheur, le lendemain
il se mit à pleuvoir ; l'eau entrait sous la tente, me
mouillant jusqu'aux os, Sous l'effet de la fièvre, je perdis
connaissance ; durant une semaine, je restai entre la vie et la
mort, sans aucun soin, Mes amis réussirent à me faire donner du
lait concentré par les Français ; avec de l'aspirine et de la
chance , je réussis à rendre le dessus [ …] C'est ainsi
qu'une dizaine de jours après mon arrivée, nous rentrions au camp,
entassés dans une des premières baraques construite, Les baraques
étaient en planches vite montées et n'étaient fermées que d'un
seul côté ; quand la pluie tombait du côté Nord,l'eau
pénétrait à l'intérieur. Nous étions peut-être un millier par
baraque, A mesure que nous arrivions, nous devions aider à la
construction des baraques suivantes . Grâce au dévouement et à
l'aide des camarades je repris peu à peu mes forces. Vers la fin
mars quand le camp fut presque entièrement monté, je me trouvais
déjà en forme, capable d'affronter notre nouvelle situation, Les
allées du camp étaient de véritables bourbiers, en raison de la
pluie ; une demi-douzaine de robinets fournissait l'eau potable
pendant une heure par jour ; un petit ruisseau coulait sur un
côté du camp ; et il fallait attendre des heures pour se laver
dans une eau dégoûtante, savon et crasse. Nourriture ? Un
morceau de pain par jour, du riz cuit à l'eau, de très rares petits
bouts de viande, sans sel, Il fallait vraiment être habitué pour
supporter une telle existence... »
CROISER
DES TEMOIGNAGES POUR EN VERIFIER L' AUTHENTICITE
OU
ENCORE et en castillan , pour changer =
1939 Argelés-sur-Mer :
FEDERICA
MONTSENY, relataba :
Un
artículo de la ex ministra de la Cultura española en el exilio,
“Durante
tres días, en el campo de Argelés se amontonó a millares de
personas sin absolutamente ningún alimento. Las defecaciones, que se
contaban a millares, debían hacerse en el mismo reducto donde se
comía y se dormía. A los tres días, llegó una furgoneta militar
llena de pan. Descargaron el pan, y un gendarme, subido sobre una
silla, lo iba tirando a la multitud hambrienta. Después
perfeccionaron el procedimiento, llegaban guardias a caballo y lo
repartían tirándolo desde lo alto de las bestias, divirtiéndose
mucho del espectáculo que ofrecían los hombres disputándose como
perros un pedazo de pan… Frío, hambre, la lluvia que no cesaba de
caer. Se dormía bajo las estrellas durante febrero y marzo. El agua
la extraían con bombas del mar, filtrada por la arena. Epidemia de
disentería. Se arrojaban las entrañas. Las defecaciones se
filtraban bajo la arena, infectando las aguas que luego bebían.
Sarna, piojos. La guerra y la caza al piojo. Escorbuto. 25 a 30
muertos diarios. Los heridos en Argelés… Un buen día llegó la
caballería de los colonizados a desalojar a los refugiados. Lanzaron
los caballos encima y a golpes de sable hicieron incluso correr a los
heridos. Muchos caían por el suelo perdiendo las muletas. Los
caballos pasaban por encima suyo, sin que aquellos hombres de
mentalidad salvaje y primitiva, tuviesen piedad de sus gritos de
dolor y del espectáculo dantesco”. Unas semanas después, los
refugiados empezaron a criar forúnculos y pupas como consecuencia de
la pésima alimentación y las condiciones de vida. Los comían los
piojos y las chinches en medio de aquel lodazal. La ración de agua
era de un cuarto de litro por cabeza y día, 3.000 litros de agua
pestilente para 16.000 personas. Eso es lo que regalaba el Gobierno.
Fueron tratados muy mal. Cientos de miles de los nuestros, famélicos
y andrajosos, vivieron una doble derrota. . Proseguía el artículo:
“Hasta mayo los tuvieron sobre el fango y en las playas heladas. En
la primera oleada de la muerte cayeron unos 35.000 españoles; 150.00
volvieron a España. Los guardianes no los perdían de vista. Uno
voló por los aires por el efecto de una granada: Había matado a
tiros a uno de los nuestros”.
Marzo 1939–
El famoso fotógrafo ROBERT CAPA
Capa
visitó el enorme campo en la playa de Argelés, donde se encontraban
en ese momento encerrados más de 80.000 republicanos españoles. La
descripción que hizo del mismo fue:
“Un
infierno sobre la arena; los hombres allí sobreviven bajo tiendas de
fortuna y chozas de paja, que ofrecen una miserable protección
contra la arena y el viento. Para coronar todo ello, no hay agua
potable, sino el agua salobre extraída de agujeros cavados en la
arena”.
Et présenté pages 56 à 60, dans « Les espagnols en France » par B, Vargas et D, Debord - Editions de l'attribut – 2010
Habla el refugiado madrileño, Mariano Marcos =
Integré rápidamente le equipo de locutores del campo. Éramos cuatro: Gallo, un gran dibujante de La Vanguardia, Menéndez, un maestro de escuela tan simpático como sonriente, un catalán con unas grandes gafas de carey y yo. Formábamos un equipo formidable. Todo visitante que franqueaba el portal que separaba los “concentradores” de los “concentrados” se dirigía de entrada a nuestra caseta que simbolizaba para todos el ombligo del campo. Nosotros éramos los encargados de acogerlos y de llamar por el micrófono a la persona que deseaban ver. Nuestra vida de “speakers” nos permitía combatir la peor de las calamidades de un “concentrado”: ¡la inactividad! Nos relevábamos al micro y estábamos en tan buena sintonía que nos remplazábamos en el más perfecto desorden sin problema. A menudo éramos dos al mismo tiempo en el puesto, tal y como se muestra en el dibujo dónde Gallo me representó en primer plano con el micro en la mano, y él apartado hacia atrás, como queriendo vigilar mis actos. Me gustan mucho todos los dibujos de Gallo, pero debo confesar que cuando miro éste se me encoge el corazón.
Por la noche, las ratas se entregaban a carreras nocturnas en nuestra home. Lo más fastidioso de estos bichos, era que no respetaban ni la más mínima regla de cortesía y se permitían pasarnos por encima y hacernos cosquillas en la cara.
Mis tres compañeros se envolvían el cuerpo entero bajo la manta, incluida la cabeza, protegiéndose así de cualquier contacto de las ratas con la cara. En cuanto a mí, yo era incapaz. ¡La muerte por asfixia habría sido súbita! Me hizo falta amañar un tubo en forma de chimenea dónde me cupiese la boca y la nariz juntas, para que pudiese respirar, dejando el resto de la cara y de la cabeza bien escondidas debajo de la manta. Utilicé la tela elástica de la manga de una vieja camisa. La parte más ancha me servía de capucha y la “manga de aire” estaba enganchada con un cordel al armazón superior de la cama, dónde dormía Gallo. Él me dibujó con la capucha levantada, pero yo dormía debajo de ella. El comandante del campo, que se temía una epidemia de tifus, decidió otorgar una prima de 25 céntimos a todos aquellos refugiados que llevasen una rata muerta al micro. Para evitar el hacinamiento de cadáveres de ratas en nuestro reducto, les cortábamos la cola y le devolvíamos “el objeto” al interesado. Ni que decir tiene que para la prima, la rata debía tener su cola. ... » in p. 58-59, « Les espagnols en France .
Une vie au-delà des Pyrénées » -Bruno Vargas, Didier Debord – Editions de l'attribut . (Toulouse, 2010 )
ooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooo
en esos tiempos tan antiguos
Aqui, el frio y la "acogida" a Prats de Mollo de esos "robadores" de madera (... contra el frio del invierno)
en esos tiempos tan antiguos
y en Argeles
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